Un dormeur ne doit pas parler de qui l’occupe.
Les jeunes filles plument volontiers ces coqs
Blessés par l’automne, enroulés dans leurs jupes,
Et plus coloriés que maillets de croquet.

A tout prix il faut se taire, soyons braves ;
N’avoir pas l’air de nous connaître est fort prudent.
Si c’est par une erreur que vous sortez du rêve,
Les filles ont vite fait d’y mettre la dent.

Tenons-nous à l’écart des crimes de l’automne,
A toute vitesse tournez votre arc en ciel.
Sur l’herbe les filles dansent avec les hommes.
Sautant naïvement entre leurs bras cruels.

Dormeur, attendez-moi derrière l’arbre à songes,
(Pourvu que l’orchestre me laisser m’endormir)
Pourvu que jusqu’à vous mes deux jambes s’allongent,
Comme le clair de lune allongé sur la mer.

dit par Jean MERCURE

Jean COCTEAU (Opéra, 1925-1927)