Je puis mourir ce soir! Averses, vents, soleil
Distribueront partout mon coeur, mes nerfs, mes moelles.
Tout sera dit pour moi! Ni rêve, ni réveil.
Je n’aurai pas été là-bas, dans les étoiles!
En tous sens, je le sais, sur ces mondes lointains,
Pèlerins comme nous des pâles solitudes,
Dans la douceur des nuits tendant vers nous les mains,
Des Humanités soeurs rêvent par multitudes!
Oui! des frères partout! (Je le sais, je le sais!)
Ils sont seuls comme nous. – Palpitants de tristesse,
La nuit, ils nous font signe! Ah! n’irons-nous jamais?
On se consolerait dans la grande détresse!
Les astres, c’est certain, un jour s’aborderont!
Peut-être alors luira l’Aurore universelle
Que nous chantent ces gueux qui vont, l’Idée au front!
Ce sera contre Dieu la clameur fraternelle!
Hélas! avant ces temps, averses, vents, soleil
Auront au loin perdu mon coeur, mes nerfs, mes moelles,
Tout se fera sans moi! Ni rêve, ni réveil!
Je n’aurai pas été dans les douces étoiles!
dit par Pierre FRESNAY